Au cours de cette interview, le nutritionniste du sport David Padaré explique en détail 3 erreurs qu’il constate auprès de ses patients sportifs coureurs. Faites-vous l’une de ces 3 erreurs de nutrition ?
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Maxence Rigottier : Bonjour à tous, c’est Maxence Rigottier de blog course à pied.com. Aujourd’hui, je suis avec David Padaré, qui est diététicien du sport, journaliste dans plusieurs magazines comme le magazine Running Attitude. Au cours de cette interview, je vais poser pas mal de questions à David concernant la nutrition du sportif. Tout d’abord, je vais laisser David se présenter, ensuite je lui poserai toutes mes questions au cours de l’interview. Salut David !
David Padaré : Bonjour Maxence.
Maxence Rigottier : Est-ce que tu peux te présenter pour nos auditeurs et les lecteurs du blog ?
Maxence Rigottier : Tu fais des triathlons Iron Man ou des courtes distances ?
David Padaré : Non, modestement, je fais des courtes distances, voire du sprint parfois. Il faut du temps pour s’entrainer sur des préparations du type Iron Man. Et je manque de temps.
Maxence Rigottier : Donc puisque tu fais pas mal d’entrainement comme la natation, le vélo, la course à pied, quels conseils pourrais-tu nous donner, à toutes les personnes qui un petit peu comme tout le monde, comme toi, comme moi n’ont pas trop le temps pour s’entrainer, et qui souhaitent courir un petit peu après manger ? Quels conseils pour courir après manger ?
David Padaré : En fait, il y a deux écueils qui peuvent guetter le coureur lorsqu’il se décide à courir après manger. C’est 1) les problèmes digestifs, ça semble évident, et puis 2) ça peut être l’hypoglycémie réactionnelle ou la glucopénie. J’expliquerai un petit peu la différence entre les deux.
Concernant les problèmes digestifs, la première mesure de bon sens, je dirais, c’est de laisser un laps de temps entre la fin du repas et le début de la mise en activité. Cependant, on remarque et j’ai remarqué aussi que l’organisme pouvait s’habituer à diminuer le laps de temps entre la fin du repas et le début de la mise en activité. Chez des sportifs non-entrainés ou débutants, il faut laisser deux heures, voire trois heures après un repas. Chez des sportifs entrainés ou qui ont l’habitude de s’alimenter pendant leur compétition, par exemple sur des ultra-trails ou sur des entrainements super longs, on peut remarquer qu’ils sont capables de courir assez rapidement une heure, quasiment, après le repas. Bien entendu, ils sélectionnent leurs aliments de manière à ce que ce soit des aliments assez digestes, mais ils sont capables de courir assez rapidement avec le ventre lesté. Donc ça, c’est assez intéressant, et ça fait partie de la préparation nutritionnelle.
Deuxièmement, ce sont les aliments qui contiennent des fibres : les céréales complètes, les légumes secs, les légumes en général, les fruits à fibre… Les fibres ne se digèrent pas d’ailleurs, elles ne font que passer par notre corps et sont éliminées par les voies courantes. Mais elles ont tendance à rester, donc ça crée des lourdeurs, surtout quand on court après. Et puis il y a les sécrétions gastriques, qui sont quand même importantes, car l’organisme essaie de digérer ces fibres –mais il n’y parvient pas, et ça crée aussi de l’acidité.
Ensuite, il y a tout ce qui est viandes tendineuses, viandes Kéradineuses, les viandes qui sont très chargées en protéines… Effectivement, les protéines sont assez longues à digérer, il faut entre 4 et 5 heures, donc on va éviter de manger trop de viandes, notamment les viandes les plus riches en résidus : les viandes à bourguignon et à pot-au-feu.
Ensuite, le troisième type d’aliments auquel on va faire attention, ce sont les aliments qui stimulent le plus de sécrétions biliaires, puisqu’ils peuvent créer des remontées acides : on a tous essayé de courir après avoir mangé un plat ou un déjeuner un peu riche. Les viandes grasses, les sauces, les fritures, les graisses cuites, les viennoiseries, tout ça, c’est très riche en graisse, et donc ça oblige l’organisme à augmenter ses sécrétions biliaires pour digérer les graisses, et ça crée des remontés qui peuvent être pénalisantes pour s’entrainer.
Ensuite, dernier type d’aliments, dernier type de danger, ce sont les aliments qui sont sujet à fermentation. Les céréales en font partie, mais je pense surtout en fait au lactose, le sucre du lait. Comme tous les sucres, c’est un sucre qui fermente. Si la digestion n’est pas terminée, ou si, par exemple pour le pain et la pomme de terre, il y a eu un délai trop court avant le début de l’activité, les aliments qui n’ont pas été digérés fermentent avec l’augmentation de la température du corps, et puis les ballonnements, et ça crée des lourdeurs digestives, des problèmes digestifs.
Donc ça, ce sont vraiment les trois types d’aliments auxquels il faut faire attention,…
Concernant la glucopénie et l’hypoglycémie : l’hypoglycémie, ça peut survenir lorsqu’on a eu un repas très sucré et que l’on court, que l’on a un démarrage un peu rapide…
Maxence Rigottier : On peut avoir des vertiges ?
David Padaré : Ca concerne effectivement certaines personnes qui sécrètent beaucoup d’insuline. C’est-à-dire qu’on a d’abord une hyperglycémie : une augmentation forte du taux de sucre dans le sang, suivie quelques temps après d’une hypoglycémie, puisque l’organisme réagit en sécrétant beaucoup d’insuline pour faire baisser le taux de sucre dans le sang. Mais il en sécrète trop, et donc, au moment où on démarre l’activité, on a une grosse demande en sucre, mais il n’y a plus suffisamment de sucre dans le sang. Donc on fait une hypoglycémie réactionnelle. Bon, ça, c’est assez rare quand même.
Après, la glucopénie, c’est différent. C’est quand, vraiment, les cellules musculaires n’ont plus du tout de réserves énergétiques, plus de glucose. Exemple : vous avez un petit déjeuner sans glucides, un déjeuner avec légumes, poissons, sans glucides non plus, et vous allez vous entrainer, vous faites une séance importante à 19 heures sans avoir mangé aucun sucre lent. Ça peut passer une journée ou deux, mais la troisième journée, vous allez effectivement avoir un déficit d’énergie. Voilà, c’est la glucopédie. En résumé, il faut avoir une consommation de sucres lents avant l’effort, ça me semble logique.
Maxence Rigottier : Donc grosso modo, c’est généralement dans les trois heures suivant le repas qu’il est déconseillé de courir ? Ou un peu plus ?
David Padaré : On considère en fait qu’un repas va être digéré, en gros, aux alentours de trois heures. Mais on est vraiment tous différents. Plus on est mince, plus la digestion peut être lente. Donc après, ça dépend des gens, mais on va dire qu’en moyenne, c’est trois heures. Et après, ça dépend du type d’aliments : si vous avez des aliments à index glycémique bas, l’absorption est plus lente ; si vous avez des aliments à index glycémique élevé, l’absorption est plus rapide. Les aliments à index glycémique bas, justement, c’est tout ce qui est féculents, céréales complètes, le pain complet, des choses comme ça. Et les aliments à index glycémique élevé, ça va être le pain d’épices, ça va être la confiture, ça va être la biscotte, des choses comme ça qui peuvent être digérées assez rapidement, et donc qui peuvent constituer une collation adaptée avant l’effort. Une heure avant l’effort, par exemple, ça sera digéré assez rapidement et il n’y aura pas de lourdeurs digestives.
Maxence Rigottier : Pour rebondir sur tes propos, tu es également consultant chez Nutéoconsult : quel plan nutritionnel adopter la dernière semaine avant de courir soit un 10 kilomètres, un semi-marathon ou un marathon ?
David Padaré : Ce sont trois types d’effort différents. Le 10 kilomètres, c’est un effort de moins d’une heure. Donc là, ça ne nécessite pas forcément d’adopter une stratégie particulière la dernière semaine, si ce n’est d’avoir un poids optimisé : optimiser son taux de graisse. Donc on va diminuer les sucres rapides et les graisses saturées : c’est ce qui encourage le plus la formation de graisses, donc en diminuant déjà ces deux types d’aliments dans sa nourriture, ça permet d’optimiser le taux de graisse. Ensuite, on va veiller, le dernier jour (la veille, le samedi), d’avoir au moins un repas avec des féculents, une quantité normale : une assiette de féculents, histoire de recharger un petit peu les batteries. Et puis le petit déjeuner, il va être important. Il faut qu’il soit un mélange de sucres rapides et de sucres lents, pour pouvoir fournir un effort bref pour les meilleurs, ça va être 30-35 minutes. Donc il faut vraiment que les sucres soient disponibles immédiatement avec un confort digestif total. Le moindre problème digestif, c’est des précieuses secondes qui sont perdues.
Pour le semi-marathon, c’est un effort de plus d’une heure, ça peut aller jusqu’à deux heure, en moyenne, on va dire 1h30. Là on va dire qu’il faut quand même veiller à avoir une petite charge glucidique. La charge glucidique, ça signifie qu’on va essayer de partir avec les muscles remplis de carburant, c’est-à-dire de glycogène (le glycogène, c’est les sucres qui sont contenus dans le muscle). Donc là, on va prévoir, peut-être deux à trois jours avant, le vendredi et le samedi, d’avoir au moins à chaque repas une petite portion de féculents, pour être sûr d’avoir la charge glucidique adaptée. Et puis également, à la différence du 10-kilomètres, on va adapter une stratégie pendant la course : il y aura peut-être la prise d’un gel, ou prise d’une boisson si c’est possible, durant l’épreuve. Donc là, la stratégie concerne à la fois l’avant-épreuve et l’épreuve en elle-même.
Et puis pour le marathon, on peut appliquer effectivement une vraie stratégie de charge glucidique. La charge glucidique, on peut la faire soit le mercredi et le jeudi, c’est-à-dire qu’on modifie son alimentation de manière à introduire de grosses quantités de féculents, pour avoir un stock de glycogène qui soit au maximum. Et puis à partir du vendredi-samedi, on mange normalement, pour éviter les inconforts digestifs et pour éviter de manger trop à proximité de l’épreuve, ce qui créerait une dépense énergétique liée à la digestion et une fatigue inutiles. Donc la surcharge se fait le mercredi ou le jeudi. Ensuite, le matin de la course également, le petit déjeuner est important. Et puis il y a la stratégie de course, aussi. L’alimentation pendant la course est fondamentale : la prise régulière de boisson, l’hydratation, tout ça, c’est important.
Maxence Rigottier : Donc ça, c’est un aperçu des trois courses les plus importantes que font généralement les coureurs : 10 kilomètres, semi-marathon ou marathon…
David Padaré : Voilà.
Maxence Rigottier : Et pour toutes les personnes qui souhaitent perdre du poids : comment perdre du poids grâce à la course à pied ? Quels conseils pourrais-tu donner à toutes les personnes qui souhaitent maigrir en courant ?
David Padaré : La première mesure à mettre en place, c’est de rééquilibrer son alimentation, puisque ça ne sert à rien d’accumuler les efforts, de multiplier les sorties, en se disant qu’en augmentant les sorties, on va brûler plus de calories. Ça ne sert rien si derrière, on n’a pas une alimentation qui est un minimum cadrée. Pour les personnes, les athlètes, les sportifs qui présentent un petit excédent de tissus graisseux, la priorité, c’est de rééquilibrer l’alimentation, et on obtiendra naturellement une diminution du poids, ça c’est évident, grâce à une diminution du taux de graisse. Puisque en fait, ce qui nous intéresse, c’est de baisser le taux de graisse, et pas de toucher à la masse musculaire, la masse maigre.
Ensuite, pour les athlètes qui sont déjà relativement secs, qui ont déjà un taux de graisse relativement optimisé, on peut s’orienter vers la course à pied à jeun, à l’intégrer une ou deux fois dans le mois. Effectivement, des études ont prouvé que c’était plus efficace, lorsqu’on avait un taux de graisse relativement bas (entre 10% et 12%). C’est relativement efficace puisque on fait des catécholamines, qui sont en fait des hormones qui ont la capacité de faire sortir la graisse des tissus et des cellules dans lesquels ils sont stockés, notamment des adipocytes. L’entrainement à jeun est bien adapté pour des personnes qui sont déjà plutôt minces, déjà plutôt sèches.
Ensuite, on peut pratiquer un régime hypoglucidique, c’est-à-dire diminué en sucres lents et en sucres rapides, de manière à obliger l’organisme à fabriquer son propre sucre à partir d’autres substrats énergétiques. Lesquels ? Les graisses de réserve et les acides aminés, notamment les acides aminés raffinés qu’on trouve dans le muscle. Voilà, c’est une capacité qu’a l’organisme, qu’il met en œuvre notamment lors des jeûnes longs, ou lors des entrainements et compétitions de très longue durée. Sur des sorties supérieures à 3-4 heures, il arrive à recycler ses graisses et ses acides aminés raffinés pour créer de l’énergie, pour créer du glucose qui va ensuite être utilisé comme ressource énergétique.
Donc le sportif qui est capable de bien travailler cette filière-là, il a un double avantage. Il va augmenter son rendement, puisqu’il va avoir à sa disposition trois types de ressources : les glucides, les lipides et les protéines, ce qui va lui permettre d’épargner son stock de glycogène.
Et puis ensuite, il va perdre du poids, puisqu’en utilisant ses ressources en graisse, il optimise son taux de graisse. C’est un axe important de la préparation nutritionnelle. Par contre, pour sécuriser ce type de programme, on encourage une supplémentation en BCAA ou en protéines, puisque effectivement, les acides aminés souffrent beaucoup de ce type de régimes hypoglucidiques. On encouragera aussi la prise d’Omega 3, pour éviter que ces graisses, qui sont des graisses fondamentales, soient trop utilisées comme ressources énergétiques –alors qu’elles n’ont pas cette vocation-là normalement : elles ont une vocation plus structurale, fonctionnelle, notamment pour les membranes cellulaires et les hormones. Nous, ce qu’on veut, c’est que ce soient plutôt les graisses saturées qui soient utilisées comme ressources énergétiques, non pas les bonnes graisses, les Omega 3.
Maxence Rigottier : Exactement. Egalement, en tant que consultant, tu rencontres beaucoup de sportifs. Quelles sont les trois pires erreurs que tu rencontres chez tes patients sportifs, où tu te dis encore : « Waouh, cette erreur revient une nouvelle fois » ?
David Padaré : En fait, la première erreur récurrente est celle qui consiste à bannir les féculents : le riz, les pâtes, se dire que voilà, ça fait grossir…
Maxence Rigottier : Manger que du pain, alors ?
David Padaré : Et voilà, a contrario, d’avoir des consommations de pain qui sont énormes. En fait, c’est la même chose, pain ou féculents. C’est la même chose, sauf que dans le pain, il n’y a pas l’eau. Dans le pain, il y a un pourcentage d’eau qui est de 30%, alors que dans les féculents, le pourcentage d’eau est de 70%. Donc en fait, c’est comme si vous mangiez des féculents concentrés. Donc remplacer l’un par l’autre, c’est pas une bonne solution, surtout que le pain a un indice glycémique qui est plus élevé que les féculents. C’est-à-dire qu’il va être absorbé plus rapidement, qu’il va y avoir une sécrétion d’insuline plus importante, et c’est donc un cercle vicieux dans lequel on a plus faim, dans lequel quand on mange, on sécrète plus d’insuline et on fabrique plus de graisses. Donc bannir les féculents, je pense que ce n’est pas une bonne chose. D’ailleurs, sur la préparation nutritionnelle, les athlètes avec qui je travaille qui réintroduisent les féculents à la place du pain le voient bien, puisqu’ils optimisent leur taux de graisse et améliorent leurs performances, parce qu’ils ont de meilleures sensations durant l’entrainement et durant leurs compétitions.
Maxence Rigottier : Donc ça, c’était la première erreur. Les sportifs vont bannir les féculents et manger trop de pain…
David Padaré : Voilà, ils vont bannir les féculents et vont se diriger vers plus de pain, plus de biscotteries, plus de céréales, de produits raffinés, des choses comme ça.
La deuxième erreur, c’est de faire un dîner trop copieux. Souvent, le petit déjeuner va être rapide. Pourquoi il va être rapide, ou escamoté ? Parce que le dîner, lui, a été copieux. Donc le matin on a moins faim. Le midi, on déjeune un peu sur le pouce, parce qu’on est un peu pressé et parce qu’on n’a pas envie d’être trop lourd pendant la journée. Donc du coup, on a un petit déjeuner escamoté voire sauté, un déjeuner très rapide, on a du stress professionnel dans la journée, voire un entrainement en fin de journée, et quand on arrive le soir, on est affamé. Et là, on recharge énormément…
Maxence Rigottier : Et là, on mange énormément !…
David Padaré : On mange énormément ! Pour ceux qui ne mangent pas de féculents, on va mettre un peu de gruyère sur les légumes, on va rajouter un petit peu d’huile d’olive, on va se prendre un petit dessert gourmand, une petite crème dessert… On va trouver, de toute façon, d’autres sources de sucre. On va compenser par d’autres sources de sucre : un petit chocolat, un petit biscuit chocolaté. C’est la récompense le soir en fait, on déstresse, on décompresse. Et les repas, ils sont à rallonge, ils sont excessifs. Et donc, on a du mal à dormir, et le lendemain, on se réveille, on n’a pas très faim finalement parce qu’on a mangé trop le soir, et ainsi de suite. Et on est dans un cercle vicieux.
Donc il faut réintroduire un vrai petit déjeuner ; au déjeuner, il faut vraiment qu’il y ait les aliments les plus importants. Le jour où il n’y a pas d’entrainement en fin d’après-midi, on n’est pas obligé d’avoir des féculents, mais les jours où il y a entrainement, il vaut mieux quand même en avoir. Faut pas oublier les protéines, un peu de légumes, un fruit, un produit laitier. Et puis le soir, par contre, on est à proximité du coucher, donc la dépense énergétique est derrière nous, pas devant nous. Le soir, on s’apprête à dormir, donc la dépense énergétique va être très faible. Donc si on mange trop, on va fabriquer de la graisse, puisque tout ce qui n’est pas consommé est stocké. Donc ça fait partie du rééquilibre alimentaire. Il faudrait organiser son alimentation de manière à avoir des repas équilibrés, et non pas un diner trop copieux.
Maxence Rigottier : D’accord.
David Padaré : Alors la troisième erreur, c’est de consommer beaucoup de boissons excitantes, notamment le café.
Maxence Rigottier : Ça c’est vrai, beaucoup de coureurs boivent du café.
David Padaré : Voilà. Les sportifs, souvent, ce sont des personnes qui sont très actives, voire parfois hyperactives. Donc ce sont des personnes qui sont très speed et qui ont besoin de café pour tenir le coup, puisqu’ils ont des journées très chargées , ils se chargent eux-mêmes parce qu’ils en ont besoin, ils sont très dynamiques. Mais ils oublient de boire, souvent, et ils préfèrent prendre du café plutôt que boire. Le café, ça a un effet diurétique, donc ça déshydrate. On entre dans un cercle vicieux où l’on se déshydrate petit à petit, et ça crée des problèmes comme des tendinites, des choses comme ça. Et puis ça ne permet pas un processus de nettoyage de l’organisme idéal, puisqu’on sait que l’eau permet de filtrer les déchets à travers les reins. Et lorsque l’on n’est pas suffisamment hydraté, les déchets ont tendance à stagner, s’accumulent. Et sur les parties terminales comme les tendons d’Achille, là où il y a un peu des culs-de-sac, c’est là où les déchets peuvent s’accumuler et abîmer les fibres, donc les tendons.
Maxence Rigottier : D’accord. Donc, pour récapituler les erreurs : 1) Principalement, bannir les féculents ; 2) Faire un repas trop copieux le soir ; et 3) Boire des boissons trop excitantes
David Padaré : Des boissons pas forcément énergétiques, mais excitantes, comme le café, et donc diurétiques.
Maxence Rigottier : Excitantes, pardon. Et en tant que nutritionniste du sport, qu’est-ce que tu penses des gels, des produits énergétiques ? Est-ce que c’est juste du marketing, ou y a-t-il une réelle utilité pour le coureur ? Quelle est ton opinion sur ce sujet ?
David Padaré : Effectivement, je suis professionnel de la diététique, mais je suis également sur le terrain puisque je pratique aussi le sport, et je côtoie des sportifs. Et à travers ces trois points de vue, je peux dire aujourd’hui qu’ils ont un réel intérêt. La preuve, c’est que les coureurs qui commencent à tester un petit peu dans leur pratique soit des boissons énergétiques, soit des boissons isotoniques, ou des gels (une fois qu’ils ont trouvé le gel qui leur convient), ou des barres, des boissons de récupération, ils reviennent très rarement en arrière. Donc il y a un réel intérêt. Il y a aujourd’hui sur le marché une disponibilité de produits qui est très large, qui peut correspondre à tout le monde, à la fois sur le plan qualitatif si l’on veut des produits naturels, des produits bios, si l’on veut des produits qui aient du goût, pas de goût, qui aient une texture particulière, une concentration particulière…voilà, il y a du choix.
Il faut respecter les précautions qui figurent sur l’emballage, les précautions d’usage. Par exemple, lorsqu’on consomme un gel énergétique, il faut bien entendu boire, puisque le gel, en fait, c’est comme une boisson, sans l’eau. On a la concentration en sucre d’une boisson énergétique, mais sans l’eau. Donc ça peut créer une forme de déshydratation, puisque s’il n’y a pas l’eau, l’organisme est obligé de puiser dans ses propres réserves d’eau pour diluer le sucre donc ce n’est pas ce qu’on attend. Donc il faut faire attention sur certains produits. Mais aujourd’hui, par exemple, les recommandations de l’ASFA font figurer l’intérêt vraiment important des boissons isotoniques pour éviter les problèmes de déshydratation.
Maxence Rigottier : D’accord. Pour finir sur une dernière question au cours de cette interview : Que manger après une compétition, un 10-kilomètres, semi-marathon ou marathon ? Quelles sont tes conseils par rapport à l’alimentation post-course ?
David Padaré : Il faut agir dans le sens du métabolisme. Que ce soit un 10 kilomètres, un semi-marathon ou un marathon, l’alimentation immédiate est la même. C’est-à-dire que lorsqu’on termine le 10-kilomètres, l’organisme est en hyper-catabolisme, il brûle en fait tout ce qu’il a sous la main, tout le carburant. Donc il est en train de brûler du sucre, il est en train de brûler éventuellement des graisses, il est en train de brûler éventuellement des acides aminés. Donc ce qu’il faut lui apporter, c’est des sucres ; des sucres rapides, hein ! Là on ne va pas apporter des sucres lents, parce que le temps que ce soit digéré, il aura brûlé ses propres réserves. On va éviter, justement, qu’il continue à brûler ses réserves, puisque ces réserves elles sont importantes pour nous pour la récupération. Donc on va lui apporter ce dont il a besoin sur l’instant, c’est-à-dire des sucres rapides ; on va lui apporter éventuellement des acides aminés, donc les trois acides aminés ramifiés dont on parlait tout à l’heure, qui sont brûlés lors de l’activité physique, donc les BCAA. Puisque toute chimie nécessite de l’eau, on va lui apporter de l’eau, puisqu’il y a une déshydratation suite à l’activité physique. On va lui apporter des minéraux, puisque toute chimie nécessite aussi des catalyseurs, donc notamment les minéraux, notamment les vitamines importantes du groupe B. Donc je dirais que l’idéal et le plus simple, en fait, c’est de continuer à boire sa boisson de course pendant les trente minutes qui suivent, et consommer, s’il y a, du pain d’épices, des fruits secs, des choses comme ça.
Ensuite, une heure après la fin de l’épreuve, la température commence à diminuer, on est moins en hyper-catabolisme. Il faut essayer d’accompagner, voire de stimuler les processus de récupération. L’inverse du catabolisme, c’est l’anabolisme, c’est-à-dire la réparation des tissus, la fabrication de nouveaux tissus musculaires. Donc là, l’apport de protéines (de vraies protéines) peut être intéressant. Avant, il n’est pas intéressant, car elles vont être brûlées. A partir d’une heure, une heure et demie, ça peut être intéressant. Ça peut être un milk-shake de récupération, ça peut être une boisson lactée, quelque chose comme ça, ou alors une barre hyper-protéinée, ou alors pour faire simple, une tranche de jambon, un œuf, si on est en déplacement…
Ensuite, il y a le repas qui va suivre. Là, il faut avoir une alimentation plutôt alcaline, puisque l’organisme, après un effort, est acide. Donc il faut neutraliser cette acidité, et pour cela, il faut utiliser des aliments qui sont vecteurs de minéraux basiques. Les minéraux basiques, c’est le potassium, le sodium, le calcium et le magnésium. On va trouver tout ça dans les légumes doux, la pomme de terre, le quinoa dans les fruits doux, on va trouver ça dans les produits laitiers, dans l’huile d’olive… Tout ça, c’est des aliments alcalins. On va trouver aussi dans les fruits secs oléagineux : les amandes, les noisettes… Donc c’est ce qu’il faut privilégier. Et puis on va aussi utiliser des poissons, des viandes blanches, des choses comme ça, ou des préparations ovolactées, par exemple des quiches. Donc des viandes plutôt maigres. Mieux vaut éviter la viande rouge juste après un effort.
Maxence Rigottier : Donc ça, c’est l’aperçu soit pour une course de 10 kilomètres, semi-marathon ou marathon ?
David Padaré : Voilà. Donc c’est sûr que pour le 10-kilomètres,…
Maxence Rigottier : Il n’y a pas besoin de faire quelque chose de réel et spécifique…
David Padaré : Ca dépend de l’intensité… C’est vrai que sur un 10 kilomètres sur lequel on a vraiment abîmé le muscle, on va surtout insister sur les protéines. Par contre, la recharge énergétique en terme de féculents, sucres lents, va peut-être être moins intense, puisqu’on a quand même dépensé moins de sucres lents, moins de glycogènes. Mais sur le marathon, on va insister sur les rations de féculents. Plutôt que de les prendre en une fois, on va justement échelonner les prises, après trente minutes, une heure, et puis sur le repas, voire même un peu plus tard. Il faut échelonner les prises plutôt que de les prendre sur un seul et même repas. J’oubliais d’ailleurs, en termes de boisson, les boissons gazeuses bien sûr, riches en bicarbonates : l’eau de Vichy, cela va de soi.
Maxence Rigottier : D’accord. Donc avec tout ça, logiquement, on peut bien récupérer de l’effort que l’on vient d’effectuer…
David Padaré : Tout-à-fait.
Maxence Rigottier : Merci pour cette interview et pour tous tes conseils. Donc vous pouvez retrouver David sur nuteoconsult.com…
David Padaré : Tout-à-fait. www.nuteoconsult.com.
Maxence Rigottier : …Et également dans différents magazines comme Running Attitude, etc.
David Padaré : Voilà. Running Coach, Cycling Coach… Y’a pas mal de magazines dans lesquels j’écris.
Maxence Rigottier : Merci une nouvelle fois, et pour ma part, je te dis à bientôt.
David Padaré : A bientôt.
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